Taxe d’habitation  / Politique
Pourquoi le Qatar prouve que la taxe d’habitation au Gabon est une aberration
Publié le : 18 décembre 2025 à 18h04min | Mis à jour : il y a 1 semaine
Pourquoi le Qatar prouve que la taxe d’habitation au Gabon est une aberration. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

Pourquoi le Qatar prouve que la taxe d’habitation au Gabon est une aberration. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

Il suffit parfois d’une comparaison pour révéler l’absurde. Celle entre le Gabon et le Qatar, appliquée à la taxe d’habitation, en est une. Non pas pour opposer deux pays que tout semble séparer, mais pour mettre en lumière une incohérence fondamentale : faire payer un impôt local là où l’État n’assure pas les services qu’il prétend financer.


Au Qatar, - ce véritable paradis fiscal - les résidents ne paient ni taxe d’habitation ni impôt sur le revenu. Pourtant, l’État est omniprésent dans la vie quotidienne. Les routes sont entretenues, éclairées, nettoyées. L’eau potable et l’électricité sont disponibles en continu. Les déchets sont collectés régulièrement. La sécurité est visible, structurée, assumée.

le Qatar finance ses services publics à partir de ses ressources nationales, notamment gazières, et d’une fiscalité ciblée sur l’activité économique. Le logement n’est pas considéré comme une base fiscale punitive, mais comme un droit normal à une vie décente.

Ce modèle repose sur une réalité simple : le Qatar finance ses services publics à partir de ses ressources nationales, notamment gazières, et d’une fiscalité ciblée sur l’activité économique. Le logement n’est pas considéré comme une base fiscale punitive, mais comme un droit normal à une vie décente.

Résultat : le citoyen ne paie pas pour espérer un service. Il bénéficie d’abord, il contribue ensuite, indirectement.

Au Gabon, la logique inverse

Au Gabon, la taxe d’habitation est exigée dans un contexte radicalement différent. Dans de nombreux quartiers urbains, les routes sont dégradées, parfois impraticables. L’éclairage public est absent ou défaillant. Le ramassage des ordures est irrégulier, quand il existe. L’eau potable est intermittente. Les coupures d’électricité font partie du quotidien.

Et pourtant, la taxe est là. Mensuelle. Incompressible. Indiscutable.

Les montants annoncés - de quelques milliers à plusieurs dizaines de milliers de francs CFA selon les zones - peuvent sembler modestes sur le papier. Mais dans un pays où une large partie de la population vit sans revenu stable, dans l’économie informelle ou au chômage, cette taxe devient une charge réelle, parfois lourde, toujours injustifiée.

Payer pour ce que l’État ne fait pas

La contradiction est flagrante. Les habitants financent eux-mêmes l’essentiel de ce que l’État devrait assurer :
– ils réparent leurs routes,
– installent leurs propres éclairages,
– paient des abonnements privés pour l’eau,
– achètent des groupes électrogènes pour l’électricité,
– organisent la sécurité de leurs quartiers.

Puis, on leur demande de payer une taxe censée financer… ces mêmes services !

Ils paient donc deux fois. Une fois par nécessité, une fois par obligation fiscale.

Une taxe héritée, jamais justifiée

La taxe d’habitation au Gabon n’a jamais fait l’objet d’un débat public sérieux. Elle s’inscrit dans une logique administrative héritée, reproduite sans évaluation, sans audit, sans lien mesurable avec l’amélioration du cadre de vie.

Dans un pays où une majorité de logements est auto-construite, souvent sans accompagnement public, sans voirie préalable, sans réseaux installés, taxer l’habitation revient à taxer l’effort individuel, pas un service collectif.

Une injustice sociale silencieuse

Contrairement à ce qui est parfois avancé, cette taxe ne touche pas en priorité les plus aisés. Elle frappe surtout ceux qui n’ont ni les moyens de contester, ni la possibilité d’échapper à l’administration. Elle ne tient pas compte du revenu réel, ni de la qualité des services, ni des conditions de vie.

C’est une fiscalité de facilité. Une taxe simple à collecter, difficile à refuser, politiquement peu coûteuse… mais socialement destructrice.

Ce que montre réellement l’exemple qatari

Comparer le Gabon au Qatar ne revient pas à dire que le Gabon doit copier un modèle étranger (même si pour le coup il y a plus à prendre et à apprendre dans cet Emirat) . Cela revient à rappeler un principe universel de toute fiscalité légitime : on ne taxe pas ce que l’on ne fournit pas.

Le Qatar démontre qu’un État peut financer des services publics sans taxer le simple fait d’habiter. Le Gabon, pourtant riche en pétrole, en manganèse et en ressources forestières, choisit l’option inverse : taxer d’abord, servir plus tard ou jamais.

La règle devrait être simple, lisible, incontestable :
pas de services, pas de taxe.

Une réforme devenue incontournable

Maintenir la taxe d’habitation dans sa forme actuelle, c’est institutionnaliser une incohérence. C’est demander aux citoyens de financer une présence publique qu’ils ne voient pas. C’est entretenir la défiance envers l’impôt et, plus largement, envers l’État.

La règle devrait être simple, lisible, incontestable :
pas de services, pas de taxe.

Ce n’est ni un slogan ni une provocation. C’est le minimum et surtout une question de bon sens. Tant que cette règle ne sera pas appliquée, la taxe d’habitation au Gabon restera ce qu’elle est aujourd’hui : une aberration fiscale.