Libreville 2 : La Vraie Fausse Bonne Idée du Président du CTRI. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent
Mercredi 1er novembre, après un tête-à-tête avec le secrétaire général du Conseil supérieur de l’Ordre gabonais des architectes, le Président du CTRI a dévoilé un projet qui a suscité l’enthousiasme général des Gabonais : la création de Libreville 2. Une initiative qui se veut pharaonique, promettant une annexe de la capitale encore plus belle et urbanisée. Une idée qui aurait germé dans l’esprit fertile de Gervais Oniane, le haut représentant. En apparence, une idée lumineuse, mais comme souvent, les (...)
Un Assentiment en Trompe-l’œil
L’assentiment général, pourtant, est un mirage dans un pays où plus de 54% de la population réside dans la province où sera érigé Libreville 2. Les habitants de l’Estuaire représentent la majorité des Gabonais, et dans l’ensemble, ces derniers considèrent les problèmes de Libreville comme les problèmes du Gabon tout entier, même si ce n’est pas toujours le cas. Aucun Librevillois ne se plaint de l’absence de services bancaires ou de boulangeries, mais à Mabanda, la réalité est bien différente.
Libreville 2 : Une Fausse Bonne Idée ?
Pourquoi Libreville 2 est-elle une fausse bonne idée ? En remontant à 1960, on constate que l’Estuaire était la troisième province la plus peuplée, avec seulement 15% de la population du pays. Cependant, les derniers recensements de 2013 placent l’Estuaire en tête avec une écrasante majorité de 54%. Comment en sommes-nous arrivés là ? Le développement du pays n’a jamais été équilibré ; tout a été centralisé à Libreville. Depuis 1960, les gens n’ont cessé de quitter l’hinterland pour la capitale, créant ainsi un déséquilibre de développement flagrant entre Libreville et les autres régions.
Où est l’urgence ?
Alors, où est l’urgence de créer un Libreville 2 qui risque d’attirer encore plus les populations vers la capitale ? Le Gabon doit lutter pour améliorer sa sécurité alimentaire et réduire sa dépendance extérieure. Comment y parvenir si l’on vide constamment l’intérieur du pays pour remplir la capitale ?
L’exode rural corollaire de la dépendance alimentaire de l’insécurité alimentaire qui en découle
Les chiffres de la Banque mondiale révèlent qu’en 1960, 83,5% de la population gabonaise était rurale. En 63 ans, ce chiffre a chuté à une maigre portion de 9%. Outre la question démographique, se pose la légitimité du Président du CTRI à mener ce projet. Il n’a pas été élu, son quitus populaire découlant d’un putsch visant à restaurer les institutions. Libreville est-elle une institution républicaine ? Nous suggérons que ce projet soit débattu et piloté par un président de la république légitimement élu.
« vox populi vox Dei »
Soyons clairvoyants : Quel Avenir pour Mabanda, Fougamou, Ndjolé, Mitzic… ?
Il n’est pas question de délégitimer l’action du CTRI, mais de souligner l’urgence de rendre l’intérieur du pays attractif. Soyons humains : qui peut partir vivre à Mabanda de bon cœur, sans boulangerie moderne, avec une connexion internet digne de l’an 2000, aucune structure hospitalière décente, aucune banque, et une vie sociale réduite à cause de la faible population ? La priorité doit être l’aménagement équilibré du territoire, évitant que l’affectation à l’intérieur ne soit perçue comme une sanction.
Yvan Cédric NZE