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Referendum constitutionnel pour l’Alliance Démocratique Solidaire (ADS) c’est NON  / Politique
L’HYPERPRESIDENTIALISME : un recul démocratique au Gabon
Publié le : 11 novembre 2024 à 14h09min | Mis à jour : il y a 1 mois
L’HYPERPRESIDENTIALISME : un recul démocratique au Gabon. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

L’HYPERPRESIDENTIALISME : un recul démocratique au Gabon. Photo: Droits réservés/Gabon Intelligent

Par cette tribune, le mouvement Alliance Démocratique Solidaire (ADS) dénonce l’hyperprésidentialisme de la nouvelle constitution gabonaise et invite la population à rejeter ce texte."


Dissolution de l’Assemblée : Un pouvoir asymétrique

D’abord, l’une des mesures les plus alarmantes est le pouvoir conféré au Président de dissoudre l’Assemblée Nationale. Ce droit, qu’il peut exercer une fois par mandat, permet au chef de l’État de directement le Parlement, sous prétexte de "crises" ou de "blocages". La dissolution parlementaire devrait être un mécanisme ultime, destiné à régler des situations véritablement critiques. Cependant, en concentrant ce pouvoir entre les mains du Président, le projet de constitution crée une dynamique inégale : le Parlement, représentant élu du peuple, peut être dissous, mais il ne possède aucun moyen comparable de révoquer le Président, sauf dans des situations d’extrême gravité, telles que la haute trahison ou des délits majeurs, des cas bien rares dans l’histoire politique.

Cette asymétrie met en lumière un paradoxe : le Président peut remettre en question le mandat des parlementaires, mais l’inverse n’est pas possible. Ce déséquilibre de prérogatives réduit le Parlement à une instance contrôlée, plutôt qu’à un acteur indépendant capable de garantir la redevabilité du Président devant les citoyens.

Les ordonnances : Une législation sans Parlement

Le Président possède aussi le pouvoir de légiférer par ordonnance, notamment en cas d’urgence. Les ordonnances lui permettent de contourner le Parlement pour imposer des mesures de manière immédiate et unilatérale, réduisant le Parlement au rôle de simple instance de ratification. Bien que ces ordonnances soient théoriquement soumises à une validation parlementaire, ce contrôle est, dans les faits, limité : le Président peut user de sa prééminence et de l’urgence pour imposer des politiques avant que le Parlement n’ait pu pleinement les débattre ou les amender.

Cette capacité de légiférer sans passer par le Parlement affaiblit gravement le rôle de la représentation nationale dans le processus législatif, contournant le principe même de la séparation des pouvoirs et confiant au Président un contrôle quasi-total sur l’agenda législatif.

Le contrôle budgétaire : une indépendance financière sous influence

En matière de budget, si le Parlement n’adopte pas le projet de finances dans le délai imparti, le Président peut intervenir pour établir le budget par ordonnance. Cela place une pression continue sur le Parlement, l’obligeant à agir dans l’urgence sous peine de voir le Président trancher directement. Ce mécanisme réduit le pouvoir du Parlement, dont l’une des fonctions premières dans une démocratie est de contrôler les finances publiques. Ici encore, le Parlement devient subordonné aux volontés de l’exécutif.

Les pouvoirs exceptionnels : une menace pour les libertés

Dans des contextes de crise, le Président peut proclamer l’état d’urgence ou l’état de siège. Bien que ces mesures doivent être validées par le Parlement si elles dépassent quinze jours, le Président détient toujours le contrôle initial et, en tant qu’autorité suprême de l’exécutif, peut mettre en œuvre des restrictions aux libertés fondamentales sans contre-pouvoir immédiat. De plus, dans ce même cadre de pouvoirs exceptionnels, aucune institution de la République ne peut être suspendue, sauf par décision du Président, conférant ainsi à l’exécutif une capacité de contrôle total sur le fonctionnement institutionnel du pays.

Le rôle de la Cour Constitutionnelle : Un arbitre sous influence ?

Bien que la Cour Constitutionnelle soit théoriquement indépendante et agisse comme arbitre des conflits entre pouvoirs, sa nomination et sa dépendance au cadre constitutionnel défini par le Président posent la question de son impartialité réelle. Dans un tel contexte d’hyperprésidentialisme, la Cour peut difficilement assurer un contrepoids effectif, d’autant plus que ses prérogatives sont limitées en matière de contrôle des actes présidentiels. Elle pourrait même être perçue comme un organe de légitimation des décisions exécutives, plutôt qu’une véritable garantie de la constitutionnalité et du respect de l’équilibre
des pouvoirs.

Conclusion : Le risque d’un pouvoir présidentiel sans contrôle

En somme, ce projet de constitution reflète une structure de pouvoir qui tend dangereusement vers un hyperprésidentialisme, une concentration excessive du pouvoir entre les mains du Président. En affaiblissant le Parlement et en le privant de ses moyens de contrôle, le projet de constitution renforce la figure présidentielle au détriment de la démocratie. L’équilibre des pouvoirs, loin d’être un principe accessoire, est la pierre angulaire d’une gouvernance juste, inclusive et transparente. Il ne peut y avoir de
véritable démocratie sans un Parlement fort, capable de représenter les citoyens, de légiférer en leur nom et de contrôler l’action de l’exécutif.
Ce projet de constitution doit donc être repensé afin de rétablir l’équilibre des pouvoirs. Les Gabonais méritent une constitution qui protège leurs droits et libertés, en garantissant que personne, pas même le Président, ne puisse agir sans être tenu responsable. Il est impératif que la constitution consacre un véritable équilibre des pouvoirs, pour une République véritablement démocratique, respectueuse des principes de justice et d’égalité.